Réalisé entre Le
Courrier de l’or (Westbound, 1959)
et Comanche Station en 1960, la Chevauchée de la vengeance (Ride Lonesome, 1959) est l’avant-dernière
collaboration entre Budd Boetticher et son acteur fétiche Randolph Scott.
Ancien shérif reconverti en chasseur de primes, Ben Brigade (Randolph Scott)
capture Billy Jones (James Best), le frère de Frank Jones (Lee Van Cleef). Billy
doit servir d’appât pour attirer son frère dans cette clairière au sol rocailleux,
délimitée par une rangée d’arbres s’apparentant à une arène propice au
règlement de compte final. Frank a naguère pendu la femme de Ben au même arbre
mort que celui qui sert désormais de potence pour Billy. Le visage impassible
et minéral de Ben armé de sa Winchester, cache une volonté farouche d’assouvir
sa vengeance. C’est un homme meurtri, fracturé et dévasté par le meurtre de sa
femme. De retour sur les lieux du crime, il veut se libérer de sa haine et
exorciser ses démons intérieurs. Le sort de Billy ne l’intéresse pas. La corde
au cou, celui-ci vit néanmoins une situation quelque peu délicate. La pendaison
est une figure récurrente du western : L’Étrange
incident (The Ox-Bow Incident, William Wellman, 1943), La Colline des
potences (The Hanging Tree, Delmer Daves, 1959), Les Deux cavaliers
(Two Rode Together, John Ford, 1961)
ou encore Pendez-les haut et court (Hang ‘hem High, Ted Post, 1968) font de
la potence la matérialisation de la loi de Lynch, mais surtout des haines et
des intolérances vis-à-vis des Indiens, des Noirs, des Mexicains surtout, mais aussi
des voleurs de bétail et autres badmen.
Mais Ben Brigade n’est pas de cette humanité qui se complait ignominieusement
dans ce type d’exécution sommaire. Héros hiératique doté de la morale de celui
qui sait que son combat est juste, il attend l’arrivée de Frank et lui règle
son compte promptement. Resté seul désormais devant l’arbre qui le domine de
toute sa sinistre présence, Ben choisit d’y mettre le feu, moins pour cautériser
la blessure béante qui a motivé sa vengeance que pour se purifier de tout ce
qu’il a haï profondément en lui : une pulsion de mort dans une stricte
application de la loi du talion. Mais le mouvement de grue ascendant de la
caméra contribuant à écraser Ben contredit cette catharsis qui devrait lui
permettre de se libérer totalement de ses obsessions. Les bras ballants, figé
dans ses souvenirs, il regarde tristement la fumée de l’arbre-potence qui
s’élève en tournoyant dans le ciel. Et soudain, une tension s’établit entre
l’arbre incandescent et Ben. La mort de Franck le met désormais seul face à
lui-même et, veuf inconsolé, il ne peut que mourir.
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