vendredi 21 décembre 2018

Le gladiateur chez Richard Fleischer





Barabbas (1961), sorti deux ans après Ben-Hur (William Wyler, 1959), permet à Jack Palance d’incarner l'un de ses plus grands rôles. Dirigé de main de maître par Richard Fleischer, il incarne Torvald, un gladiateur halluciné, ivre de violence et de sang,  jouissant du spectacle de la mort qu’il inflige à tous ses adversaires dans l’arène du Colisée à Rome. Pourtant, cette fois-ci, opposé à Barabbas (Anthony Quinn, hors-champ), l’invincible gladiateur perd de sa superbe. Son opposant, uniquement armé d’une lance et à pied, esquive l’affrontement, provoquant l’hilarité de la foule au  détriment de Torvald. Face à ces spectateurs moqueurs et vociférants, celui-ci vient d’enlever son casque, bien décidé à trancher la gorge de l’impudent qui a osé remettre en cause sa présumée supériorité.  Juché sur son char, tenant fermement de sa main gauche les rênes de ses chevaux et de sa main droite le filet du rétiaire posé sur son épaule, il s’apprête à lancer l’assaut final. Ses yeux, brillant d’une joie extatique et mauvaise, éclairent un visage animé d’un rictus carnassier pour exprimer toute la sauvagerie névrotique de celui qui perd pied mais qui n’a jamais été aussi dangereux. Les tics nerveux qui agitent son corps longiligne matérialisent une personnalité trouble que le physique de Jack Palance sert à merveille. Avec ses pommettes saillantes, ses yeux profonds, et les contours de son visage taillé à la serpe (la légende hollywoodienne dit que cette physionomie est héritée de sa pratique de la boxe, d’un accident d’avion pendant la Seconde Guerre mondiale et d’une reconstruction chirurgicale), l’acteur est littéralement possédé par ce rôle qui renvoie à ceux qu’il a déjà  interprétés: Blackie, le truand dans Panique dans la rue (Panic in the Streets, Elia Kazan, 1950), Toriano, l’Apache rebelle du Sorcier du Rio Grande (Arrowhead, Charles Marquis Warren, 1953) ou encore le lieutenant Joe Costa dans Attaque (Attack, Robert Aldrich, 1956). Mais dans l’arène romaine dont le sable s’est gorgé du sang de ceux qui n’ont pas eu l’intelligence tactique de Barabbas,Torvald est seul, submergé par son hubris et son incapacité à imaginer qu’il puisse être terrassé et offert en victime à la vindicte d’une foule qui rejette les vaincus,  prête à brûler celui qu’elle a adoré pendant des années, et qui n’attend que le moment ou elle pourra, unanimement, pointer le pouce vers le bas pour signifier sa mise à mort. Alors que les spectateurs viennent de se lever, Torvald s’élance en ricanant et en fouettant violemment le dos de ses chevaux subitement affolés et cabrés. Projeté en avant, son char bondit dans une charge irrésistible. Son conducteur est à ce moment quelque chose de plus qu’un gladiateur. Il représente une force primitive et bestiale, un défi brutal au voyeurisme morbide de la foule dont la clameur résonne rageusement dans l’arène.



2 commentaires:

  1. Bonjour
    on me soutient que Jack Palance joue le méchant qui conduit le char aux roues dentelées dans le Ben Hur de Wyler. Confirmez-vous ?
    Merci

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    1. Bonjour à vous,
      Désolé de vous répondre avec autant de délai mais je n'étais plus allé sur mon blog depuis très longtemps. C'est Stephen Boyd qui joue le méchant dans le Ben-Hur de Wyler et non Jack Palance.
      Bien à vous

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