samedi 20 août 2016

La sieste chez John Sturges


Les quarante-cinq premières minutes des Sept Mercenaires (The Magnificent Seven de John Sturges/1960) sont utilisées pour présenter à tour de rôle les sept protagonistes du film; Chris (Yul Brynner), Vin (Steve McQueen), Bernardo (Charles Bronson), Chico (Horst Buchholz), Lee (Robert Vaughn), Harry Luck (Brad Dexter) et le dernier qui nous intéresse ici, Britt (James Coburn). Celui-ci est bien tranquillement adossé à une barrière en bois, profitant de l’ombre de ses lames pour faire une petite sieste réparatrice après un repas dont les restes sont bien visibles dans l’assiette qui se trouve à côté de sa jambe droite. À sa gauche, une selle avec un lasso mais sans le cheval, probablement parqué dans un corral à proximité. À l’arrière-plan et pour compléter le tableau un autre «cheval», mais celui-ci de fer, barre l’horizon que l’on perçoit à peine au-delà de la locomotive. Ce train, symbole d’un Ouest en mutation, sert en fait d’estrade aux deux mécaniciens de la cabine de conduite, spectateurs décontractés de la scène qui est en train de se dérouler sous leurs yeux. Un dénommé Wallace, à la trogne immédiatement identifiable puisqu’il s’agit de l’acteur Robert J. Wilke - qui a, à son actif, autant de westerns qu’il y a de médailles sur l’uniforme d’un officier de l’ex-armée soviétique – est en train d’apostropher notre dormeur. Persuadé qu’il est plus rapide au colt que Britt au couteau, l’inconscient ose défier celui qui ne demande rien d’autre - avec tout le flegme qui caractérise le  jeu de James Coburn - que de jouir d’un moment de quiétude. Les mains agrippées à son gilet et solidement campé sur ses deux jambes, le cow-boy provoque donc Britt en duel. Le western n’ayant jamais présenté cette figure de style qu’est le duel dont l’un des protagonistes est sur le point de tomber en phase de sommeil très profond, Britt, faisant contre mauvaise fortune, bon coeur est contraint de se lever pour faire taire l’impénitent. Le moment qui suit est entré dans la légende du genre. Peu loquace, voire taiseux, mais terriblement concentré, Britt, lance à une vitesse foudroyante son couteau dans la poitrine de son adversaire qui s’effondre dans la poussière. Le lancer de couteau est extrêmement rare dans ce genre très codifié qu’est le western, probablement en raison de la liturgie du duel aux colts qui y est particulièrement prégnante. Outre Britt, le jeune Mississippi (James Caan) dans El Dorado de Howard Hawks (1966) et Alias (Bob Dylan) dans Pat Garrett et Billy The Kid de Sam Peckinpah (1973) ont l’occasion d’exercer leur talent artisanal face à l’adversité. La résolution des tensions s’est donc enrichie d’un geste mais le fatum, tué ou être tué, reste toujours identique.





De gauche à droite: Yul Brynner, Steve McQueen, Horst Buchholz, Charles Bronson, Robert Vaughn, Brad Dexter et James Coburn

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