mardi 1 mars 2016

Le cinéma au cinéma chez Billy Wilder


Ce photogramme extrait de Boulevard du crépuscule (Sunset Boulevard de Billy Wilder, 1950) met en scène Joe Gillis (William Holden) et Norma Desmond (Gloria Swanson). L’image est superbe. Les deux protagonistes sont dans une salle de cinéma privée et regardent un film. Norma Desmond est une ancienne star du cinéma muet qui ne s’est jamais remise de l’arrêt brutal de sa carrière. Le passage au parlant lui a été fatal, lui retirant le succès et la célébrité et inlassablement, elle visionne les films qui ont fait sa gloire (précisons que Gloria Swanson incarne ici son propre rôle de star déchue). À sa droite, Joe Gillis, un scénariste raté qui s’est fait engager par l’ancienne vedette pour écrire un scénario qui permettrait à Norma de revenir sur le devant de la scène. Norma n’existe que par le regard des autres. Le faisceau du projecteur lui rend de manière fugitive sa gloire passée. Le corps soudainement raidi, le bras levé et l’index tendu accentuent le caractère halluciné du personnage tout à sa volonté de revenir devant les caméras. Joe Gillis, quant à lui, est dans l’ombre, écrasé par la mante religieuse qui le dévore petit à petit. Désemparé par tant de hargne égocentrique, il regarde Norma avec un mélange de fascination et de répulsion qui souligne les rapports de domination et de soumission qui organisent leur relation. Leur attitude réciproque accentue le décalage qui fait de cette union aux intérêts bien compris, un mélange malsain et mortifère. Cette mise en abyme du monde hollywoodien est l’une des plus puissantes du cinéma.



Aucun commentaire:

Publier un commentaire