Les 8 salopards (Hateful Eight, Quentin Tarantino, 2015)
N’ayant jamais été un partisan inconditionnel du cinéma de
Quentin Tarantino, je lui reconnais néanmoins (en toute modestie) une
exceptionnelle maîtrise de tout le champ cinématographique; cadrage,
photographie, direction des acteurs, rebondissements de l’intrigue, références
cinéphiliques ….. J’aime particulièrement la Tarantino touch consistant à
filmer de (très) longs tunnels de dialogues innocents (en apparence), où la
badinerie côtoie l’insignifiant mais où suinte progressivement une montée de
tension qui finit par exploser dans des déferlantes de sang dont la durée est inversement
proportionnelle à leur préparation. Tout
cela se trouve dans Hateful Eight.
Sept hommes et unefemme se retrouvent
dans une auberge, rapidement coincés par une tempête de neige qui fait rage à
l’extérieur. Le huis clos est parfait. Tromperies et trahisons vont se succéder
tout au long des 3 heures de projection et opposer une brochette d’acteurs
tarantinesques comme Samuel L. Jackson, Tim Roth ou encore Michael Madsen. Le
réalisateur a expliqué vouloir évoquer les relations entre les Blancs et les
Noirs au lendemain de la Guerre de Sécession mais avec en sous-texte évidemment,
la situation de ces dites relations aux États-Unis aujourd’hui. Il poursuit
donc le sillon creusé depuis son précédent film Django Unchained (2012) dont le thème central était l’esclavage.
Mais son propos reste en surface sans
être approfondi. Il y a bien des dialogues percutants, « les Noirs ne sont en
sécurité que lorsque les Blancs sont désarmés», mais le tout finit par tourner
à vide. L’humour qui était l’autre marque de fabrique de Tarantino et qui lui
permettait de contrebalancer l’extrême violence de ses films, est ici
curieusement absent (ou presque). Du coup, Inglourious
Basterds me semble bien plusplus
fort et convaincant. Et puis surtout, dans ce genre éminemment codé qu’est le
western, ce huis clos enneigé avait déjà laissé des traces depuis 1952 avec The Outcasts of Poker Flat de Joseph
Newman ou encore depuis 1958 avec Day of
the Outlaw de André De Toth (déjà des groupes humains coincés dans des
cabanes au milieu de nulle part alors qu’au-dehors souffle la tempête de neige).
Ces deux films avaient déjà cassé les codes du genre en refusant les
chevauchées, le mouvement, le désert brûlant, les Indiens, la cavalerie, les
ciels immenses……… tout en privilégiant un ascétisme visuel, une action statique
souvent nocturne (très proche du film noir) mais enrichie par une tension
interne, une peur qui envahissait progressivement les personnages dotés depsychologies particulièrement fouillées.
Allez, on aime toujours autant Tarantino, ne serait-ce que pour cet
extraordinaire travelling arrière cadrant un Christ en bois à demi-enseveli
sous la neige nous faisant progressivement découvrir les collines environnantes
du Wyoming.
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